Les grandes lignes de l’histoire géologique du massif du Chablais.
Il y a 200 millions d’années environ, au début du Mésozoïque, une mer peu profonde existait à la place des Alpes. Cette mer alpine (ou océan Alpin) a été soumise à une forte évaporation liée au climat chaud qui prévalait alors. Cette évaporation a favorisé le dépôt de couches de sel. Vers moins 190 millions d’années, c’est-à-dire au début du Jurassique, cette mer peu profonde connaît une déformation liée à l’agrandissement de l’océan Atlantique. Ces déformations tectoniques ont créé des bassins dans lesquels se sont déposées de puissantes séries de sédiments dont le faciès variait suivant la profondeur de la tranche d’eau, l’éloignement des côtes, la direction des courants. Vers moins 130 millions d’années, au Crétacé moyen et supérieur, les distensions liées à l’expansion de l’océan Atlantique ont cessé et c’est un mouvement inverse qui s’est organisé avec le rapprochement de la plaque africaine vers la plaque eurasiatique. La fermeture de la mer alpine s’est poursuivie jusqu’au début de l’Oligocène, il y a 35 millions d’années. Les dépôts sédimentaires se sont décollés de leur socle d’origine grâce aux niveaux d’évaporites (anhydrite, sel gemme) qui ont joué un rôle de lubrifiant et se sont empilés les uns sur les autres. Là où les dépôts morainiques sont absents, il est possible de distinguer les dépôts molassiques tertiaires, notamment au mont de Boissy à l’est de Douvaine et en Suisse entre Saint Gingolph et Bouveret. Les terrains molassiques sont chevauchés par les différentes nappes de charriage qui constituent le massif du Chablais. Ainsi sur les terrains molassiques se trouvent la nappe du Gurnigel qui correspond à la montagne des Voirons au sud est de Saint Cergues, puis la nappe des Préalpes médianes qui constitue la majeure partie du Chablais. La Dent d’Oche 2222 m., le mont Billiat 1895 m. à l’ouest du lac du Jotty, les Cornettes de Bises 2432 m., la pointe d’Autigny 1808 m., le Jorat 1830 m., le mont Chauffé 2095 m., la Haute Pointe 1958 m., au nord de Sommant, constituent les points culminants de la nappe des Préalpes Médianes. Chevauchante sur cette dernière, la nappe de la Brèche dessine un vaste synclinal dont l’axe est nord-est – sud-ouest avec au nord ouest de cet axe un pli anticlinal. Du nord est au sud ouest se trouvent, sur le flanc nord-ouest du synclinal, les sommets du mont de Grange(2432), du roc de Tavaneuse 2156 m., du Roc d’Enfer 2244 m., et sur le flanc sud-est la tour de Don 1998 m., le Morclan 1970 m., la tête du Linga 2156 m., la tête du Géant 2233 m., la pointe de Chésery 2251 m., les Hauts Forts 2466m., la...
La géologie et la géomorphologie locale.
Lors d’une de vos ballades sur les sentiers qui parcourent le versant ouest du massif du Linga, entre le lac de Vonnes et Plaine-Dranse, nous vous proposons de découvrir la géologie et la géomorphologie locale. Pour la zone qui nous concerne, nous trouvons la succession de trois nappes qui, du nord au sud, sont la nappe des Préalpes médianes (Cornettes de Bise), la nappe de la brèche (Mont de Grange) et la nappe supérieure des Préalpes qui s’est déposée sur les deux précédentes au coeur des synclinaux. La mise en place de ces nappes d’origine briançonnaise et subbriançonnaise(nappe des préalpes médianes), prépiémontaise (nappe de la brèche), s’est effectuée il y a 35 millions d’années. Coupe géologique longitudinale dans le flanc sud est du massif du mont de grange, entre Pré la Joux et Villapeyron De Pré la Joux à Villapeyron, hameau situé au niveau du départ de la télécabine du Linga, on peut distinguer un escarpement de roche calcaire de la brèche supérieure qui par une succession de petites failles s’élève progressivement pour passer de 1400m. à 1750 m. au-dessus des hameaux de Très les Pierres et de la Ravine. Ensuite, et toujours par succession de failles, la couche calcaire de la brèche supérieure redescend pour réapparaître sous forme d’un petit escarpement sous les chalets des Boudimes à 1400 m. Entre Très les Pierres et Villapeyron le creusement de la vallée par les glaciers permet de distinguer les couches géologiques qui reposent sous les calcaires de la brèche supérieure avec les schistes ardoisiers, visibles sous la niche d’arrachement de l’écroulement de l’Essert à gauche de la cascade du même nom. Sous ces schistes ardoisiers reposent les calcaires de la brèche inférieure et les schistes inférieurs. Quelques escarpements de la brèche inférieure sont visibles vers 1350 m. en rive gauche du ruisseau de la Ravine. A la base du versant les dépôts glaciaires sont nombreux et de plus en plus importants vers l’aval. Depuis le retrait glaciaire (environ 12.000 ans) le remodelage des versants a entraîné: la formation de nombreux talus d’éboulis dont certains sont encore actifs (la végétation étant absente). L’action de l’eau associée au gel dans les fissures des roches provoque le processus de la gélifraction. L’eau a son volume qui augmente de 10% et exerce une pression de 14kg/cm² ce qui entraîne l’éclatement des roches qui tombent lors du dégel. des cônes de déjection comme celui élaboré à l’amont immédiat de Très les Pierres par le ruisseau de Cornillon. Le torrent, chargé des produits de l’érosion, transportait les matériaux sans difficulté tant que la pente était forte, en arrivant sur le bas du versant la pente s’adoucissant entraînait...
Châtel sous les glaciers !
Les traces glaciaires sont nombreuses sur la commune de Châtel. Le glacier de la Dranse d’Abondance prenait naissance, au sud de la commune, sous la pointe de Chésery à 2251 mètres, il s’écoulait ensuite vers Pré-la-Joux, puis prenait une direction sud ouest- nord est, il recevait quelques glaciers en provenance du versant est du massif du Mont de Grange et des glaciers descendant du massif du Linga. Aujourd’hui quelques moraines latérales sont visibles au-dessus des chalets de Plaine Dranse et des placages morainiques recouvrent le fond de la vallée Dranse. Quelques escarpements rocheux calcaires restent les témoins du passage du glacier, ces rebords d’auge glaciaire ont été soumis à la compression de la glace. Depuis le retrait du glacier, il y a environ 12000 ans, les versants sont soumis à une décompression glaciaire. Cela explique les nombreux blocs de plusieurs m3 que l’on trouve aussi bien en rive droite qu’en rive gauche de la Dranse. Pour expliquer le phénomène, nous pouvons prendre l’exemple de l’écroulement de l’Essert en avril 1986 qui a enseveli la route menant à Pré-la-Joux. Les phénomènes de décompression ont joué dans la fissuration des roches, ainsi que le rôle de l’homme (ardoisières) et les infiltrations d’eau liées à la fonte de la neige et aux pluies abondantes. Plus vers l’aval et en direction de la Chapelle d’Abondance, le glacier devait recevoir par une transfluence un bras du glacier du Rhône qui franchissait le Pas de Morgins. Une moraine convexe vers la France forme le col. Ainsi grossi, le glacier recevait encore en rive gauche l’alimentation du glacier local du Morclan, dont il reste aujourd’hui dans le paysage la forme circulaire du cirque glaciaire, puis, il continuait sa progression, en étant alimenté par de nombreux glaciers locaux, pour rejoindre le glacier du Rhône. A Châtel les dépôts morainiques, souvent épais, sont des témoins de périodes plus froides où la limite des neiges permanentes devaient se situer vers...
Essai de reconstitution du dernier retrait glaciaire dans la vallée d’Abondance.
Cette reconstitution concerne la commune de La Chapelle-d’Abondance et Abondance, sur le versant nord du massif du Mont de Grange. Au maximum du Würm Nous pouvons considérer la vallée comme étant remplie de glace jusque vers 1400 – 1500m. Cette épaisseur résulte de la réunion d’une transfluence* du glacier du Rhône et des glaciers locaux à savoir de l’amont vers l’aval, celui de la Dranse (cirque au-dessus des chalets de Plaine Dranse), glacier de Conche (dans le vallon de Fiollaz), glacier du Morclan (l’érosion glaciaire a construit, en amont du vallon du Terroit, un grand cirque), le glacier des Mattes (dans le vallon de Trébentaz), le glacier de Chemine (vallon du Folliet), le glacier de Pertuis. Ces trois derniers glaciers sont à l’origine de très beaux cirques sous le sommet du Mont de Grange. Enfin, à Abondance le glacier grossit encore avec la confluence des glaciers provenant d’Ardens et de Tavaneuse et il se trouve au passage confronté à un verrou* qui a certainement eu pour effet d’augmenter en amont l’épaisseur de la glace. Le croquis montre l’importance des glaciers dans la partie amont de la vallée d’Abondance mais aussi la construction des moraines latérales de la Combe et du glacier des Mattes. Les moraines* les plus hautes(1400 m) n’ont pas été représentées car elles se sont vraisemblablement formées lors d’une phase de stagnation du glacier à une altitude plus basse qu’au maximum. Stagnation du glacier pendant le retrait Il n’y avait certainement plus de transfluence* au Pas de Morgins et le glacier de la Dranse n’est plus alimenté que par les glaciers locaux les plus puissants. Sur le croquis nous avons représenté les glaciers descendant du Mont de Grange et rejoignant le glacier principal. Celui-ci a construit les moraines* vers 1190 m . Dernières phases du retrait sur le versant Nord du Mont de Grange: Le glacier de Chemine: Celui-ci a stagné vers 1448 m où il reste un petit morceau de vallum* morainique frontal. Puis le glacier a certainement évolué en glacier de cirque et a déposé de la moraine* vers 1980 m . Le glacier de Pertuis: Un ombilic* derrière un verrou* de Brèche Supérieure s’est développé lors du passage du glacier au maximum de sa puissance; puis le glacier a longtemps stagné vers 1640 m d’altitude pour élaborer le très beau vallum* morainique bien visible depuis 1’arête Nord-Ouest qui mène au sommet du Mont de Grange. Vocabulaire: Ombilic: forme de surcreusement située à l’amont d’une zone difficile à franchir par les glaciers que l’on appelle verrou*. Moraines :les moraines sont des dépôts glaciaires formés des matériaux, de différentes tailles, détachés de la montagne. Transfluence: Passage d’une...
Les ossements de la tanne du charbon révèlent leurs secrets
La découverte d’ossements dans une grotte située sur la commune de Vacheresse, non loin de l’alpage de Darbon avait soulevé en 2011 de nombreuses interrogations dont certaines d’entre-elles étaient jusque-là restées sans réponse. Si l’expertise archéologique menée par Joël Serralongue (Conseil général), Jean-Christophe Castel (Muséum d’histoire naturelle de Genève) et Mathieu Luret (Laboratoire d’archéologie préhistorique et d’anthropologie, Université de Genève) avait pu déterminer à quelles espèces d’animaux se rapportaient ces ossements à savoir des ours bruns, des bouquetins et des chauves-souris, il restait notamment à déterminer l’époque à laquelle avait vécu l’ours, les derniers spécimens ayant disparu au début du XXème siècle dans les Alpes françaises. Aujourd’hui, la réponse a été apportée grâce à une analyse au carbone 14 qui a été commandée par la communauté de communes de la vallée d’Abondance (dans le cadre du label Pays d’art et d’histoire) au centre de datation par le Radiocarbone de Lyon. Et la réponse a de quoi surprendre… Le résultat nous indique un âge calibré compris entre 5 726 et 5 622 av. J.-C (Age 14C de 6765±40 BP). Si l’ours est déjà connu dans la région pour cette période (fin du Mésolithique/début du Néolithique), la découverte de squelette d’ours reste assez rare dans la région et confère à celui-ci d’être l’un des plus vieux ours brun découvert en grotte de Haute-Savoie, après celui de la grotte du Baré à Onnion (daté à 36 100 +/- 1400 BP). De plus, la conservation de 8 à 9 bauges d’ours intactes, ainsi que quelques griffades sur les parois, donne à cette cavité un caractère exceptionnel pour la région. L’ensemble des ossements et charbons collectés se trouve aujourd’hui au dépôt de fouille départemental d’Annecy. Quant à la grotte, sa fermeture a été effectuée par la commune de Bonnevaux, propriétaire de la parcelle grâce à la pose d’une grille de protection visant à protéger le site des dégradations d’individus mal attentionnés, du vol de matériaux ou d’objets archéologiques, etc.. Cette grille respecte, grâce à ses barreaux horizontaux, l’occupation de la grotte par les chauves-souris. Des recherches plus approfondies et une réflexion sur la mise en valeur de cette découverte associant tous les acteurs (le spéléo-club des Mémises en tant qu’inventeur de la grotte, la commune de Vacheresse où elle se localise, la commune de Bonnevaux qui est propriétaire de la grotte, l’archéologue Mathieu Luret qui étudie le matériel prélevé, le Pays d’art et d’histoire de la vallée d’Abondance, les services départementaux et régionaux de l’archéologie, etc.) devraient permettre d’envisager prochainement une mise en valeur de ces découvertes qui représentent un intérêt archéologique majeur en vallée...
Climat du Val d’Abondance
Le Val d’Abondance est situé dans le massif préalpin septentrional du Chablais, à une trentaine de kilomètres du lac Léman. Le climat montagnard de la vallée est ainsi atténué pour les communes de Chevenoz, Vacheresse et Bonnevaux par les effets adoucissant et humide du lac en hiver. Pour les communes d’Abondance, la Chapelle-d’Abondance et Châtel, les effets du lac n’influencent quasiment plus le climat. A une échelle plus vaste, les Alpes du Nord sont soumises à des influences océaniques et continentales. Quelques généralités pour comprendre les mécanismes météorologiques Les dépressions ou zones de basses pressions se déplacent le plus souvent de l’ouest vers l’est, elles se forment sur l’océan Atlantique et elles sont accompagnées de systèmes nuageux ou perturbations. Les perturbations se constituent au contact de deux masses d’air de températures différentes (condensation). Les perturbations sont la matérialisation visible des fronts froids et des fronts chauds. Les perturbations donnent généralement des précipitations liquides ou solides (neige, grésil, grêle…). Dans l’hémisphère Nord, les vents tournent, autour du centre dépressionnaire, dans le sens inverse des aiguilles d’une montre. Les principales dépressions qui affectent notre temps sont: · les dépressions atlantiques centrées à l’ouest de la France. Elles donneront des épisodes de fœhn tant que le vent sera orienté au sud et des précipitations abondantes dans un air doux lorsque le vent s’oriente au sud-ouest. La limite pluie-neige remonte au-dessus de 2000m. en hiver. · Les dépressions centrées sur la Mer du Nord. Le passage des fronts froids donnera des précipitations plus ou moins continues avec de la neige jusqu’en plaine en hiver. Le vent sera orienté ouest à nord. · Les dépressions centrées sur le Golfe de Gênes. Elles provoquent des retours d’est avec en hiver des chutes de neige poudreuse modérées. Les anticyclones ou zones de hautes pressions sont caractérisées par un ciel souvent dégagé et des températures élevées en été, basses en hiver. En automne et en hiver, l’absence de vent provoque une couche de stratus qui recouvre les communes de Chevenoz, Vacheresse et Bonnevaux et plus rarement les communes du haut de la vallée. Au-dessus de ces nuages, le ciel est dégagé. Les principaux anticyclones qui affectent notre temps sont l’anticyclone des Acores (en été) et l’anticyclone continental (en hiver). L’importance des fronts pour expliquer la météorologie locale. Les fronts chauds: Ils correspondent à une masse d’air chaud qui s’élève au-dessus d’une masse d’air froid. Des nuages différents annoncent l’arrivée du front chaud: · Les cirrus sont les premiers, ils ont l’apparence d’un voile nuageux blanchâtre qui laisse passer les rayons du soleil. Ils évoluent à plus de 6000 m. d’altitude et la nuit, ils forment un halo de lumière autour de la lune. · Les cirro-stratus, entre 4500...