Lors de vos randonnées en montagne en été ou pendant une journée au ski, pensez à observer les formes de reliefs de la vallée d’Abondance où l’histoire glaciaire est omniprésente.
Le point d’observation, situé à l’arrivée de la télécabine de Super Châtel, permet de suivre le cours de la Dranse d’Abondance depuis sa source, sous la pointe de Chésery, jusque vers Abondance. L’écoulement change en passant d’une direction SO/NE, de Pré La Joux à Châtel, à ENE/ONO de Châtel vers Abondance.
Une constatation s’impose d’emblée avec la largeur de la vallée sensiblement plus importante de l’amont à l’aval.
Les glaciers locaux ont-ils pu calibrer la vallée?
Lors de la dernière période glaciaire appelée Würm dans les Alpes, des glaciers se sont constitués dans le massif du Chablais et même s’il n’en reste plus aujourd’hui, nombreuses sont les traces que l’on peut encore retrouver dans le paysage.
Dans l’espace qui nous entoure nous trouvons des dépôts morainiques*.
En traversant le ruisseau de Fiolaz qui prend naissance dans l’ancien cirque glaciaire du bec du « corbeau » vous rencontrerez de la moraine et en rive gauche il est possible de distinguer deux petites moraines latérales qui ont été formées par le glacier du corbeau.
Pour en revenir au glacier de la Dranse, nous savons qu’il prenait naissance sous la pointe de Chésery, qu’il s’écoulait vers Pré la Joux puis vers Châtel et qu’il recevait les apports des glaciers venant du cirque glaciaire de Coicon sous le Mont de Grange et des petits cirques de la Tête du Géant 2228 mètres et de la tête du Linga 2156 mètres.
Les cirques glaciaires du versant nord du Mont de Grange alimentent en glace le glacier de la Dranse. En rive gauche, et outre le cirque du corbeau déjà cité, seul le cirque glaciaire du Morclan est intéressant à observer depuis le sommet du Morclan ou depuis les chalets de Barbossine. Au-delà, un glacier provenait du cirque glaciaire d’Arvouin, signalons au passage la présence du magnifique lac d’Arvouin qui occupe un ombilic* associé à un verrou.
Les glaciers locaux étaient certes nombreux mais petits, alors comment expliquer l’importance des dépôts morainiques latéraux que l’on trouve à Châtel, si ce n’est pas l’intervention d’un autre glacier. Plusieurs indices permettent de penser que le glacier du Rhône devait déborder et donnait naissance à une transfluence* au Pas de Morgins. En effet le Pas de Morgins est formé par une moraine convexe vers la France dans laquelle se trouvent des galets allochtones. Dans le val de Morgins, un bloc erratique* a été trouvé à 1620 mètres (R. Blanchard 1938) donc 250 mètres plus haut que le col. Toutefois dans les dépôts morainiques sur Châtel, nous ne trouvons que des matériaux d’origine locale et ce n’est que sur la commune de Chevenoz (route de la Forclaz) que des galets cristallins attestent la présence dans la vallée du glacier du Rhône. Cela signifie qu’après la fin de la transfluence, les glaciers locaux ont continué à charrier vers l’aval les matériaux qui avaient été apportés par le glacier du Rhône.
(Texte et travail de recherche: Bertrand Guffroy)
Vocabulaire:
Ombilic: forme de surcreusement située à l’amont d’une zone difficile à franchir par les glaciers que l’on appelle verrou.
Moraines: les moraines sont des dépôts glaciaires formés des matériaux, de différentes tailles, détachés de la montagne.
Bloc erratique: Rocher de fort volume, d’origine étrangère aux roches sur lesquelles il repose et dans une position telle qu’il n’a pu être apporté que par un courant de glace.
Transfluence: Passage d’une langue glaciaire d’une vallée à une autre par un point bas de l’interfluve* (Pas-de-Morgins).
Interfluve: Partie haute de l’espace compris entre deux vallées.